Histoire du Pen ar Bed

 

 


Litho ex "The War with France" de A. Spont , 1850
tiré du manucrit de P. Choque à la Bibliothèque Nationale


Le Pen-ar-Bed au temps des Anglais

Il est probable que la navigation sur les cotes du Pen-ar-Bed remonte à la première occupation humaine de nos régions.

Les vestiges de pêcheries formées de pierres accumulées en circonférence, ont été localisée tout récemment par  le service  hydrographique à l'aide de sonars , tout près de Molène à une profondeur de quelques mètres sous le zéro de nos cartes. Le niveau de la mer  permettait de se rendre  jusque aux îles peut être sans avoir besoin de bateau.

Les fouilles actuellement  poursuivies à Ouessant mettent en évidence le lieu de vie de communautés humaines.

D'autres  apports de l'archéologie sous marine, pratiquée dans nos eaux,  ont montré que sous l'Empire romain,  des amphores vinaires et  de l'étain traversaient la Manche.

Il est probable que les navires décrits par César dans "La guerre des Gaules" naviguaient dans les ras  bien avant la guerre et il serait étonnant que leur téchnologie et pratique aitent disparu avec la conquête. Il n'y aurait rien de surprenant  qu'un signal, sorte de phare, ait été  construit  sur la pointe  Saint-Mathieu,  où aboutit une route "romaine.

Le passage des raz était délicat.
[ Raz ]

Faute se savoir sesituer sur l'eau autrement qu'à vue, fallait reconnaitre la côte et ses roches.

- La lumière du jour et peut être une aide à la navigation, était nécessaire.
- Il fallait que le vent permette de  circuler dans le sens souhaité, vers le nord ou vers le sud.-
- Il fallait surtout que les violents courants de marèe qui alterne tout les six heures soient favorables.

Il fallait enfin que ces trois conditions soient réunies.

Faute de quoi il fallait se mettre à l'abri là ou on pouvait.
Dès lors que des échanges commerciaux se sont développés l'intérêt des puissances riveraines ont trouv intérêt à  controler ce point de passage.
ll serait surprenaant qu'au temps de Rome on s'en soit abstenu.

Les représentants de l'Empereur en  Espagne  ont fait érriger la "tour d'Hercule" sau premier siècle de notre ère.
Des phares ont éxisté à Douvres et à Boulogne en ces temps impériaux.

Plus tard des hommes du nord (Vikings) empruntèrent les passages des ras de Bretagne lors de brutales expéditions  marchandes qui les poussaient  loin de leur Scandinavie sur les chemins de Russicomme aussi vers le sud, océanique et méditerranéens. Leur capacité à naviguer est devenue provierbale.
Ils allèrent jusqu'en Italie où ils fondèrent en Sicile un royaume dont la cour abrita un centre culturel flamboyant entre Orieen et Occident. Là brilla  Idrissi, le géographe  arabe qui  évoque la Ville de Sant Matha en Bretagne, dont les habitants font beaucoup de commerce. Il n'est certainement pas venu jusquà nous mais les marchands normans lui ont rapporté l'information.

Dès la première croisade des guerriers et pèlerins du Nord conduits par Guynemer de Boulogne se sont rendus en Orient par mer.
En 1189 une flotte d'une centaine de bateaux principalement frisons et flamands longea la côte anglaise puis passa devant Saint-Mathieu, avant de s'arrêter allant jsuqu'à la Rochelle, avant de poursuivre sur Saint-Jacques de Compostelle et plus tard sur Lisbonne. Ces pèlerins perdirent un bateau sur une roche près de Saint Mathieu.

En 1217 une autre flotte de pèlerins, forte de 112 bateaux, avec le Comte de Hollande séjourna à Saint Mathieu du 5 au 11 juin. On peut en lire le détail dans un texte qui nous est parvenu et qui a été publié en 1879, De Itinere Frisonorum, sous le titre Quinti Belli Sacri, Scriptores minores, par la Société de l'Orient latin.

Dès lors la route était une sorte de voie marchande.
Les puissances locales s'attachaient à en  assurer le controle, financier, entre autre.
Dès lors cet emplacement devint l'objet d'une compétion, intra bretonne, puis  entre les Ducs et fle Royaaume de France et  la couronne d'Angleterre.


fin du XIII° siècle

Les espaces maritimes de la Carte pisane ont été colorés en bleu clair afin de permettre au lecteur peu familier de ces documents une lecture plus facile.
Du coté gauche, le golfe de Gascogne. Au dessus le sud de l'Angleterre.
L'île d'Ouessant marque le changement de l'orientation d'une côte que l'auteur de la carte ne connaissait que par oui-dire.
Du coté droit, on distingue le contour de la côte méditerranéenne de l'Espagne et les Baléares. Le carroyage est une figure ptoléméenne que les italiens du XIII° siècles nommèrent toleta di martelloio
qui servait sans calcul à estimer la direction dans laquelle devait se trouver l'endroit où on voulait se rendre.
Carte pisane # 1270-90 B.N. Cartes & plans, Res. Ge B 1118


Au Seizieme siècle

Ce routier flamand du XVI° siècle donne une idée des méthodes de navigations cheminées encore à cette époque.
On y voit la pointe de Bretagne, représentée au long d'un itinéraire linéaire.
En bas Penmarc'h puis,  en remontant le ras de Sein , l'île de Sein et sa chaussée, la baie de Brest à droite,  la pointe Saint Mathieu; le chenal du four avec à gauche Ouessant et les îles Quemenes et Molène, puis en haut le Four et l'île de Batz.
On remarquera l'absence de notation directionnelle précise. Par contre les amers, clochers, moulins roches sont soigneusement notés et commentés.
C'était le chemin normal lorsqu'on venait de Bordeaux pour rejoindre Londres ou Bruges.

Publié par J. Dénucé et F. Gernez, Anvers, 1936. ex Bibliothèque communale d'Anvers n° B 29166. Coll. de l'auteur.


Comme encore e nos jours, le commerce maritime devait passer devant la pointe de Bretagne armoricaine.

Pour dépasser la pointe de Bretagne, on devait s'engager dans les ras. Lorsqu'on venait du sud le premier est celui de Sein. Il était rare de pouvoir  franchir  également celui de Saint-Mathieu dans la même marée.
Le mouillage dans la presqu'île de Crozon, (Camaret  ou Morgat offrait un asile temporaire.
Ensuite venait celui de saint Mathieu. ou dees abris pouvaient être trouvésà morgat, à Porsliogan par beau temps, dans les abers du Conquet, le plus proche, ou ceux de l'Ildut et le Wracht. Ou dans les ^les et en particulier à Quémenes, où on trouvait un peu d'eau douce.

Les naufrages étaient fréquents. Le Comte de Léon percevait bris et péages sur ses terres bordant le chenal du Four. Ces droits féodaux, repris lors des croisades par le Duc de Bretagne furent organisés avec émission de titre de paiement, portant le nom de "bref de mer".
Ces titres étaient, dans les premiers temps, délivrés à Penmarc'h et à Saint Mathieu. Leur coût variait selon la grandeur du navire.

Les moines retenaient dix pour cent du produit.

Naturellement les fraudes étaient parfois tentantes, mais les gendarmes veillaient.
Cette affaire lucrative rançonnait les bateaux de toute l'Europe.
Tous les pouvoirs temporels de l'époque se devaient de répondre aux plaintes de leurs marins.
La Bretagne s'est trouvée engagée au premier rang dans tous les conflits entre la France et l'Angleterre.


La croix pectorale des abbés de Saint Mathieu, d'origine orientale est un témoin de cette époque des Croisades.. Amis de Saint- Mathieu @

En 1152, au retour d'une croisade, la reine de France, Aliénore d'Aquitaine, se sépara du roi de France.
Elle épousa un prince angevin, Henri Plantagenet, qui devint Roi d'Angleterre. IIétait aussi duc de Normandie et devint par cette alliance, duc d'Aquitaine.

Ses possessions devinrent de beaucoup plus étendues que celles du roi de France.

 

Le commerce entre Aquitaine et Angleterre se développa très rapidement.

On attribue à Aliénore la rédaction des "règles d'Oléron", recueil de  coutumes maritimes héritées des lois de Rhodes, puis de celles du Consulat de la Mer de Majorque.

C'est à cette époque que les Anglais commencèrent à consommer des vins de Bordeaux.

Une succession de querelles dynastiques, envenimèrent des différences culturelles, qui sépareront chaque siècle un peu plus, Français et Anglais. Ces disparités croissaient avec la fusion des Normands et des peuples autochtones de l'île. La chancellerie d'Edouard III utilisa aussi bien le latin que le français jusque sous Edouard III et Richard II, mais de nombreux vocables saxons apparaissent dans les textes de cette époque. Les inventaires du château de Brest, sous contrôle anglais en 1380, en témoignent fortement.

Par ailleurs, des intérêts pré-industriels séparaient Français et Anglais en Flandre. Tout cela transforma un conflit, initialement de nature féodal, en guerres.  Au fil des générations ces guerres prirent les caractéristiques de conflits nationaux préfigurant celles que nous avons connu il y a peu.
Les intérêts commerciaux,  industriels, pesaient.
Le poids des conflits  féodaux empêchant le roi de France Saint Louis de régler le différend qui séparait la couronne de France, des Plantagenets rois d'Angleterre.

C'est son petit fils, Philippe IV , le Bel, qui porta le fer sur la plaie en plaçant, en 1295, le duché d'Aquitaine sous séquestre. Ce fut la première des guerres de Cent ans.

C'est alors que les juristes anglais mirent au point la doctrine de la souveraineté du roi d'Angleterre sur la mer.
On peut avec certaine raison voir là l'acte fondateur de la tradition anglaise, aujourd'hui séculaire, d'hégémonie anglaise sur la mer.

Les routes de mer passant sur les côtes du Pen-ar-bed, les Plantagenets montrèrent, par des alliances matrimoniales avec la famille ducale, par des dons aux Abbayes en particulier à Saint-Mathieu, leur intérêt pour la Bretagne.
Ils recherchaient, ce que nous appelons, une zone d'influence. cela les conduisit à intervenir  dans le malheureux conflit qui marqua la succession de Bretagne.
ls vinrent en alliés et se comportèrent en maîtres. Une des victimes les plus fréquentées par leur lourde amitié fut l'abbaye de Saint-Mathieu et les terroirs qui l'environnent.


La maquette ci-jointe, réalisée par les Amis de Saint-Mathieu, montre ce que pouvait être l'abbaye à la fin du Moyen-âge. Amis de Saint Mathieu @

A la suite de la mise sous séquestre du duché d'Aquitaine, le conflit  prit corps, à la suite d'affrontements de marins et de marchands établis des deux cotés de la Manche.

En 1292 un incident survenu dans l'île de Quemenes alluma une guerre navale.
Des marins gascons, sujets du roi d'Angleterre, duc d'Aquitaine, se battirent avec des marins normands, sujets du roi de France, à qui prendrait de l'eau au puits. Il y eut des morts.
De crime en vengeance, la rivalité des marins bayonnais, bretons, anglais, et normands trouva là prétextes à toutes sortes de violences.
Dans ces temps les princes délivraient des "marques", ancêtres de la "lettre de marque", qui permettait à un sujet, spolié par les habitants d'un port étranger, de se payer sur les bateaux et marins de ce même port ou pays que ses agresseurs. Quelques documents de cette nature ont survécu. Le contrôle de l'usage qui était fait de ces marques, était difficile. Il faisait l'objet d'enquêtes judiciaires, à posteriori , avec citations à comparaître à la cour pour y être jugés. Les délais de transmissions faisaient traîner les procédures pendant des années. Les archives de Londres sont riches de documents concernant des bateaux, de toutes nationalités, agressés dans les ras par Français, Anglais, Bretons, Espagnols et même des Danois. Toute l'Europe est sur les bancs.

Philippe le Bel ayant séquestré le duché d'Aquitaine, ce fut la guerre ouverte.
Une flotte anglaise destinée à soutenir  les parti anglais en Aquitaine passait le ras.
Elle s'arrêta sur la cote de Saint-Mathieu et au Conquet qui furent entièrement pillés.

Dans une enquête ordonnée par Philippe le Bel, le Vicomte d'Avranches, écrit qu'à Saint Mathieu les agresseurs ont enlevé, les objets du culte.... " et jusqu'au fers de l'huys ".
En ce temps là le fer était rare. Une paix précaire suivra . Les exactions navales commises dans les ras, seront moins fréquentes.
Cette précaité dura jusqu'à l'avénement du roi d'Angleterre Edouard III, époux  d'Isabelle, fille de Philippe  IV le bel, et à ce titre se prétenndant roi de France.

L'intervention anglaise dans la guerre de succession de Bretagne compliqua la longue période de conflits franco anglais qu'on désigne sous le nom de guerre de Cent ans dont on fixe, par tradition, le début à la succession du dernier des héritiers de Philippe le Bel. On se souviendra de la série télévisée tirée du roman de M. Druon qui, sous le titre de Les rois maudits évoque ces temps de alheurs.
Jean de Montfort, prétendant au trône ducal, soutenu par les Anglais, s'était saisi, en 1341 du château de Brest, qui tenait alors le parti de son adversaire Charles de Blois, lequel était soutenu par le ro de France.
Il y avait mis Tanguy du Chatel. Un certain Maurice du Conquet se chargeait de passer des missives confidentielles  entre de Jean de Montfort et Londres.
En 1342, Gautier de Mauny, capitaine Anglais débarqua à Brest.
Il se saisit du Conquet qui tenait pour l'adversaire de Montfort, Charles de Blois, soutenu par le roi.
En octobre 1342 Edouard III, roi d'Angleterre, en personne débarqua à Brest. Après avoir installé ses troupes dans la mêlée confuse de ce début de guerre civile, il rembarqua à Saint-Mathieu en février suivant à destination de Londres.
Il comprit tout l'intérêt de la rade de Brest dans laquelle il avait pu mettre, pur quelque temps, ses bateaux de transports de à l'abri.

Pendant trois cent ans les Anglais tenteront de contrôler Brest.

Le vieux château, dont les substructions datent de l'empire romain, furent renforcées.
Après la défaite, à Auray, en 1364, de Charles de Blois, Jean IV était devenu Duc de Bretagne.  Duc mais contesté par certains barons bretons. Il était, à ce titre, féodataire du roi de France mais ses intérêts l'attachaient à son beau-père Edouard III. Sa politique alternative entre Paris et Londres entretint le conflit. En 1366, il reçut d'Edouard III une lettre demandant, " Que la ville de Saint-Mathieu, ne nulle aultre ville ne chastel sur les ports ne soyent dessoubs la garde de Bretons, mais soient gouvernées par bons Anglois " Et le duc de le faire....

A défaut de recevoir en temps utile les crédits nécessaires à l'entretien de ses homme,s le capitaine anglais ne tarda pas à se servir dans les campagnes environnantes.
La position de Saint-Mathieu ne pouvait manquer d'attirer son attention.
C'est de là qu'on signalait les navires qui approchaient. Les confiscations de bateaux passant les ras, chargés de vins et de sel également se multiplièrent.
Les sécheries de congres et de merlus de l'abbaye étaient une source de ravitaillement et de recettes.
En 1373, des soudards anglais de Brest pillèrent un vaisseau Espagnol, la Santa Maria, dans le ras. Afin de cacher leur crime, ils mirent le feu au navire après avoir enfermé les Espagnols dans la cale. De courageux habitants de Saint-Mathieu les sauvèrent. Le crime resta impuni.
Devantla multiplication des pétitions faites par les victimes, le roi Edouard adjoignit au capitaine anglais de Brest, un receveur, chargé de gérer les réserves du château, de payer les soldes des soldats et, de contrôler que les prises sur les habitants et navires de passage se situaient dans le respect des lois.
C'était un effort mais la réalité restait pitoyable. Les exactions de soudards font l'objet des lettres du duc adréssés au roi dAngleterre.

Les procédés du capitaine anglais  de Brest devenaient plus élaborés. En 1396 il obligea, peu avant la restitution du château au duc de Bretagne, les habitants de Saint-Mathieu à payer au prix fort des " vins pourritz emplis de mer ".  Ce qui motiva l'expédiition par le Duc, d'une longue liste d'exactions dont les cons&quences étaient " que le pays se desheberge "

Froissart raconte, à sa manière, les tentatives françaises de reprise Brest, les secours apportés aux Anglais assiégés par les flottes d'Angleterre et les efforts de Dugesclin, qui , en 1373,  poursuivit le duc, lâché par ses barons, et qui  s'écappait vers Londres. L'année suivante ,Edmond de Cambridge et le duc Jean IV débarquèrent à Saint-Mathieu et vengèrent l'affront sur les pauvres gens du Conquet .

En 1377 un nouveau roi, Richard III, monta sur le trône d'Angleterre. Cette guerre avait coûté beaucoup aux deux couronnes. Elles avaient dû l'une et l'autre faire appel à l'impôt pour financer l'effort de guerre et cela d'autant plus que du coté anglais les troupes étaient soldées. Coté français nous en étions encore aux quarante jours de devoir féodal. Une fois ce devoir empli, les seigneurs pouvaient retourner dans leur manoir.
Le roi de France, Charles VI, monté au trône en 1380, fit donc lui aussi, appel a des supplétifs soldés. Sa cassette ne pouvait suffire. L'appel à la contribution fiscale posa quelques difficultés.

Le Schisme d'Occident, fut l'occasion d'une pause dans ce conflit. C'est par la diplomatie que Brest fut remis entre les mains de Jean IV, en 1397.
Ce fut la fin d'un demi siècle d'occupation anglaise du Pen-ar-Bed. La folie de Charles VI qui survient en 1392 n'y changea rien.


Le château de Brest imaginé par E. Isabey in J. Janin, La Bretagne, 1862

Les marins et marchands de Londres ne se consoleront pas de la restitution du château au duc de Bretagne.
Cette restitution était le  résultat d'un rapprochement temporaire entre les couronnes ennemies.
C'était une tentative de régler le conflit par d'autres voies qu'une guerre,  qui obérait les finances publiques.
Le parti de ce que nous appelons de nos jours les " faucons " l'emporta, obtint la destitution de Richard et de la reprise de la guerre.
En 1415, Henry V d'Angleterre massacra, à Azincourt, la chevalerie française. Mais Brest restera bretonne et française. L'évaluation de sa position, nous dirons stratégique, pour cette époque, compta dans la politique royale qui aboutit, cent ans plus tard, au traité d'union du duché à la couronne.
Brest restait pour les marins de Londres et de Bristol, une place qu'à défaut de posséder il fallait neutraliser.

La lente remontée de la dynastie capétienne, poussée par l'héroïque Jeanne d'Arc, permit de parvenir à un statut-quo s'établit avec l'Angleterre.

 Calais restait le seul point occupé par les Anglais dans le royaume de France.

Les ambitions stratégiques se déplacèrent vers la Méditerranée. Les deux pays commencèrent à ressentir les troubles conomitants conséquences de la Réforme autant que des "grandes découvertes".
La Bretagne était, enfin, en paix. Les marins Bretons étaient les rouliers des mers. Une part importante du commerce maritime de sel et de vin était transportée par des bateaux de Penmarc'h et d'autres ports du duché. Les hauts reliefs des églises de Penmarc'h et de Roscof montrent de beaux bateaux, comme on savait les faire chez nous . Le commerce du lin, vendu tant en Espagne qu'en Angleterre,  fit la richesse du Finistère.

Au gré des alliances temporaires le conflit franco-anglais se rallumait. François 1er entra en compétition contre Henry VIII.
Au cours de ce nouveau conflit Brest fut à nouveau menacé.
La duchesse Anne avait constitué une flotte de guerre. On possède encore le compte de construction d'une grande nef de Morlaix dite la Mareschale, probablement la Cordelière Avec l'agréement de la Duchesse la flotte bretonne avait guerroyé contre les Turcs, dans le Levant, sous le commandement de Prégent de Bidoux .Un des pilotes de la Cordelière , Martin le Naut, survécut à la tragique fin de ce navire et fut mené prisonnier en Angleterre. C'est probablement  qui avait livré en 1508 , au roi d'Ecosse, alors notre allié contre l'Angleterre une nef construite au Conquet sous le nom de Trésorière.

En 1513 une tentative des Anglais contre Brest se solda par un célèbre combat. On y vit la perte de La Cordelière, commandée par Hervé de Portzmoguer, et du Régent, anglais. Dans la flotte qui assaillait les Français se trouvait un navire anglais dont l'épave a été relevée récemment , la Mary Rose.

L'illustration, placée en tête de la présente page, est une lithographie tirée de l'ouvrage d'Alfred Spont The war with France, Navy records Society, 1897, elle même exécutée d'après un manuscrit de la Bibliothèque Nationale où il illustre un texte de Pierre Choque, héraut d'Anne de Bretagne.
On  y voit la Cordelière accrochée au Regent . Les deux navires brûlent. Dans quelques instants tous deux vont exploser. C'est la seule représentation connue de cet événement de guerre navale dont des chercheurs tentent de retrouver des vestiges en mer d'Iroise. Alain Bouchart, dans Les grandes chroniques de Bretaigne enjolive sans doute la fin d'un vaillant capitaine breton: " Ce nonobstant ung vaillant capitaine de mer breton, nommé Primoguet, lequel estoit capitaine d'une grande nef la royne de France avoit faict faire en la ville de Morlaix.... Mais à la fin aulcun de la Cordelière qui estoit dans la hune getta le feu dedans la Regente, parquoy le feu print aux pouldres & salpestres & furent presque tous bruslez, tant dung costé que d'autre et & y demoura l'admiral d'Angleterre & ses gens. Le capitaine Primoguet voyant le feu si près de luy & que ny avoit aulcun remede ne secours se ietta en la mer tout armé & fut noyé .... Et ce fut faict le jour Sainct Laurens, au moys d'Aoust mil cinq cens & xiii ".

Saint Laurent fut martyrisé sur le feu d'un un grill. C'est pourquoi le palais de Philippe II à l'Escorial, qui est placé sous l'invocation de ce saint, a la forme d'un grill....

Primoguet est la transcription en Français de Portzmoguer. Hervé de Portzmoguer, était de petite noblesse. Sa mère, dame du Prédic, était née au manoir du même nom. Ce manoir existe encore. Face à la mer d'Iroise, il est le dernier que l'on voit lorsqu'on arrive aux murs de l'abbaye de Saint Mathieu en venant de Plougonvelin.

Si les recherches entreprises, depuis quelques années  en vue de retrouver les épaves de la Cordelière et du Régent aboutissent, on trouvera peut-être quelques éléments donnant corps à la rumeur selon laquelle ce combat aurait vu l'usage d'une invention brestoise : le sabord. Voyez le site du Gran : http://www.archeonavale.org/Gran http://www.archeonavale.org/



Amiral anglais de l'époque d'Henri VIII et soldat anglais de même. Dessins de l'auteur

Charles VIII avait appelé du Levant Prégent de Bidoux. Avec ses galères l'amiral du Levant avait contourné l'Espagne et s'était embossé au Conquet. L'amiral anglais Howard tenta de l'en déloger mais y laissa la vie.
Prégent " fit pescher les morts " et écrivit à la Reine Anne pour lui offrir " le sifflet d'argent du dit milord " et demander ce qu'il fallait faire du corps. Il précise l'avoir " empli de sel " et ne demander comme faveur que d'en " garder le coeur ".... Cette littérature fut imprimé à Rouen sous le titre Double des lettres envoyées en cour par Prégent, capitaine des galées du Roy Les médias de l'époque, comme de la notre avaient du coeur....

A quelques années de là, en 1558, Les Français, sous la conduite du duc de Guise reprirent Calais. Ce fut un peu une surprise pour les Anglais. C'était d'abord contre l'Espagne que les Français se battaient alors; du coté de Saint-Quentin. On dit que la reine Mary Tudor en mourut de désespoir. Poussée par Philippe II d'Espagne, qui rêvait d'une alliance anglo-espagnole contre la France, la Reine d'Angleterre, mit à la mer une flotte qui devait ravager les côtes françaises et tenter de neutraliser Brest. Philippe II aurait passé contrat de mariage avec Mary Tudoren 1557, mais ne lui rendit pas visite.

L'amiral Clinton commandait ette année là, une flotte anglo-flamande. La Reine d'Angleterre les dirigea vers les côtes de France avec mission de faire les dommages possible à la place de Brest. 120 voiles, parmi lesquelles celles du comte de Hoorn et du vice amiral des Pays bas de Wacken, se présentèrent au Conquet le 29 juillet 1558 et mit à terre une force expéditionnaire..


Peinture Museum Asmolean Museum, Oxford in A regiment for the Sea by William Bourne, Hakluyt Society, 1961. @


Cette  flotte n'obtint pas de résultat significatifs pour la suite de la guerre. Par contre elle causa beaucoup de dommages aux habitants du Pen-ar-bed. Le débarquement eut lieu aux Blancs Sablons. Le Conquet, fut pillé et entièrement brûlé, Bertheaume, Saint-Mathieu, Plougonvelin également. Le Sire de Kersimon, qui rassembla le ban et l'arrière ban, obligea les Anlo-Flamands à rebrousser chemin et leur prit dit on quelques dizaines de prisonniers. Le traité de Cateau-Cambrésis, qui mit fin au conflit l'année d'après, n'évoque pas cet attentat.. bien qu'il soit évoqué par plusieurs chroniqueurs.

L'indemnisation des victimes ne semble pas avoir été au delà d'exemptions fiscale partielles qui se poursuivront pendant quelques années. On a retrouvé une enquête fait par M. de Lezonnet. Il déclare que sur 450 maison au Conquet seules douze maisons sont restées intactes. Les mauvaises langues disent que ce sont celles de marchands qui avaient des intérêts en Angleterre.

Les conflits avec  le royaume d'Espagne, fruit d'une rivalité entre François premier et Charles Quint étaient justifiés pour partie, du moins officiellement,  par des questions religieuses.
Dans le contexte explosif de la Réforme, l'amiral de Coligny, à la cour de Fontainebleau,  avait laissé la bride sur le cou à ses chiens de mer,  Normands et Bretons, très souvent de religien "réformée", lesquels s'attaquaient aux galions qui venaient d'Amérique. Voyez [ Les cartographes du Conquet ] et [Histoire de la cartographie nautique
Installés en Floride et à Rio, (la France antarctique d'André Thévet), marchands et  marins français hreligionnaires expatriès  prenaient part au commerce des"Indes.  l'Espagne tentait de maintenir un monopole. Les marchaands et marins français furent massacrés, non comme français mais comme hérétiques par les soldats de Philippe II.
Ces conflits étaient par conséquent soustendus par de puissants intérêts économiques.

Avec la paix,  les Huguenots ne furent plus autorisés à courir sus à l'espagnol.  Bloqués en métropole, ils durent faire face aux sanglantes guerres de religion.
Ce sont les Anglais qui prirent la relève, sur mer,  contre l'Espagne. Ce fut le début de la tradition maritime  en Angleterre.

Il serait étonnant qu'à l'occasion du pillage du Conquet en 1558,  Anglais et Flamands, n'aient pas récupéré quelques planches et des stocks d'almanachs nautiques réalisés par Guillaume Brouscon au Conquet de 1543 à 1548.

Nous verrons ci après ce que nous savons de ce personnage.

Un de ces almanachs a semble-t-il été la propriété de " F. Drak ".

Les Anglais se livraient à cette époque à une collecte systématique d'information nautiques sur les possessions hispano-portugaises.
Richard Hakluyt, du Middle Temple de Londres, était la cheville ouvrière de cette entreprise de renseignement.
Ami d'André Thévet, il lui acheta le Codex dit de Mendoza lequel avait été pris sur les Espagnols par un corsaire français.
Le document est depuis conservé à Londres.

Les raids et prises de Francis Drake, Hawkins, Raleigh sur les richesses des Indes exaspérèrent Philippe II au point qu'il lança sur la grande île son Invincible Armada qui connut le sort que l'on sait.


Un plan exécuté par Ubaldino,  expert des fortifications,  qui a été en service du roi de France est conservé en Grande Bretagne . Il est daté de 1563  quelques années après le sac de 1558. légende:  " plan of a landing place in Brittany " semble représenteé la plage des Blancs sablons , lieu de débarqquemeent de 1558.   Comment et pourquoi à cette date?

Document  Public Record Office, P.R.O. S.P. 70/55

Les murs des maisons qui ont survécu parlent à qui les écoutent.

Deux bourses flanquent la porte du petit château du Conquet. Cette maison forte donne sur l'ancienne rampe Lombard. Le nom de cette rue rappelle que c'est là que se tenait le Lombard, le banquier qui remplaça les Juifs expulsés du royaume. Là se payaient les brefs de mer dont le dixième était reversé à l'abbaye de Saint Mathieu.
Photo de l'auteur.

Guillaume Brouscon


Ce cartographe dont, à ce jour on ne connaît pas l'origine, réalisa, en 1543, une belle mapemonde  par laquelle on apprenait les toutes dernières découvertes tant portugaises

Guillaume Brouscon, dont, à ce jour on ne connaît pas l'origine, réalisa, en 1543, une belle mapemonde  par laquelle il exhibait les toutes dernières découvertes tant portugaises qu'espagnoles. Il est le premier à représenter sous sa forme définitive l'île de terre Neuve. Ceci correspond aux voyages de Jacques Cartier qui lors de son troisième voyage s'était assuré les service de Jean Alphonse.
Les Portugais revendiquent Jean Alphonse comme un de leurs marins. C'est peut être  lui également qui a révélé à Brouscon le continent austral, que les Dieppois désignent sous le nom de Grande Jave. Il s'agit du nord de l'Australie  Voir:[Histoire de la cartographie nautique]

Guillaume Brouscon a sans doute offert cette carte, à l'amiral, espérant une pension . Cela ne se fit pas et il se retira au Conquet.


N'ayant pas obtenu la protection qu'il semblait chercher à Paris, Brouscon rseretira au Conquet où il vécut de l'édition de ses almanachs, imprimés sur parchemin au moyen de typons de bois. Ces almanachs dont on connaît une douzaine d'exemplaires furent prisés des Anglais.
Curieusement, en 1594, lors des combats engagés contre les Espagnols en vue de la reprise de Roscanvel, ses deux fils changèrent, pour une raison qui n'est pas élucidée, leur patronyme de Brouscon en Lyneur.

Voyez [ Les cartographes du Conquet ]


Rose de marée d'après G. Brouscon, 1543

A la fin du siècle les malheureuses divisions de la France et de la Bretagne entre partisans des églises réformées et catholiques fournirent aux Espagnols l'occasion de prendre pied en Bretagne, au Blavet puis aussi de s'établir à la pointe des Espagnols. Il ne purent obtenir la réédition du château de Brest, tenu  pour le roi Henri IV de France, par Sourdeac. C'est de cette époque que date le bastion du château. C'est alors qu'en arasant les tours romaines de la courtine qui regarde vers la ville on aurait découvert une grande médaille à l'effigie de César, qui aurait, selon la légende, été replacée dans le mur du château.

Pour déloger les Espagnols de la région brestoise, Henri IV nouveau roi de France, reçut le soutien d'une flotte envoyée par la Reine Elisabeth d'Angleterre. L'église anglicane, séparée de Rome, était portée à la sympathie pour le parti du roi français issu des milieux "réformés". Gageons que la rusée et calculatrice reine vierge ne prêta pas son aide sans arrières pensées. Un allié  contre l'Espagne était toujours utile...

L'Angleterre perdit, au cours combats qui eurent lieu pour reprendre la pointe de Quelern, un de ses plus fidèles marins et explorateurs, Martin Frobisher.
Cette alliance allait contre le sens de l'histoire. Les ambitions des marchands de la city se heurtaient trop à celles de nos marins. Brest restait un guêpier qu'il fallait obturer.

Cette maison appartint à des maîtres de barques qui portaient le sel et le vin de Bordeaux en Angleterre et en Flandre, Les Bernard.
Une rue du Conquet évoquait encore leur souvenir il y a quelques décennies. Cette maison fait le coin d'une place au centre de laquelle se trouvait le grand puits du Conquet. Ce puits a été comblé par l'armée d'occupation au cours de la seconde guerre mondiale. Il gênait le passage des convois qui établissaient les fortifications du mur de l'Atlantique. Alexandre de Beauharnais y séjourna pendant la Guerre d'indépendance des Etats-Unis. Col. de l'auteur.

En 1695, une force  anglaise tenta, une nouvelle fois de surprendre le château et l'arsenal  de Brest en débarquant à Camaret.

La renaissance du commerce, de la marine et des colonies françaises sous Louis XV se fit en paix avec l'Angleterre. Mais la City veillait. Il s'agissait de savoir qui dominerait la mer et qui contrôlerait le commerce par mer. C'était la clef d'une hégémonie mondiale. Nous reçûmes de belles raclées pendant les guerres de succession d'Autriche et de Sept ans. Mais on veillait à Brest.

La guerre d'Indépendance des Etats-Unis fut l'occasion d'une revanche. Notre matériel était au meilleur niveau et nos marins nombreux grâce au système des classes mis au point par Colbert, dont on peut écrire que son établissement des Invalides fut le premier système de protection sociale institué au monde.

Naturellement Brest fut bien gardé. Les régiments se succédèrent dans le Pen-ar-Bed. C'est ainsi que le premier époux de Joséphine de Beauharnais tint poste à Bertheaume. Il logeait au Conquet dans une maison "du temps des Anglais"- c'est à dire reconstruite après la destruction de la ville en 1558- laquelle existe encore. voyez Lion d'or ]



La Révolution détruisit le bel édifice naval construit par les ministres de Louis XVI.

Napoléon tenta de relancer la marine mais Trafalgar et sans doute son peu d'attirance pour la mer ne permirent pas de tirer un parti satisfaisant d'une flotte qui à la fin du règne comptait autant de navires que l'Angleterre.

Au cours des conflits  impériaux, des forces anglaises, reçurent mission de bloquer Brest.

Pendant plusieurs années, par tous les temps, des vaisseaux de blocus tinrent la mer au large de l'Iroise. Leurs équipages purent se soutenaient grâce au " Limejuice ", ou jus de citron, qui leur évitait les effets ravageurs du scorbut. Des "Beef boats"  apportaient lesvivres et rafraîchissements nécessaires. Les Anglais perdirent là plus de navires par fortune de mer que par l'action de nos forces. Les populations riveraines s'affairaient à récupérer des épaves de certains de ces navires. Maigre compensation à l'absence des marins bretons qui croupissaient dans les pontons.

Un grand trois ponts anglais  le  Magnificent  séventra sur les Pierres noires 25 mars 1804,  Les survivants s'établirent  sur Beniguet et purent être rapatriés par d'autres navires Photo N.M.M. ref BHC 0534.

Grâce à Dieu nous ne sommes plus en guerre avec les Anglais mais le Pen-ar-bed se souvient de ces siècles de guerre et de rapines. Il nous reste les maisons des Anglais. Elles n'ont de commun avec nos amis d'outre manche que d'avoir été construites à l'époques de leurs exactions passées.

Le Pen ar bed en a-t-il terminé avec ces  guerres ?

En 1940, Le conquet fut le théâtre d'une évacuation  anarchique et tragique.  L'aviso Vauquois  explosa ssur une mine  devant la presqu'île de Kermorvan.
Les combats de la Libération  détruisirent quelques maisons. Mais rien de comparable avec ce qui arriva à Brest.

Alors fini?

Le flux de marchandises alimentant l'Europe du Nord passe toujours devant  le Pen ar bed. On ne le voit plus bien, car depuis le naufrage de l'Amoco Cadiz,  on a imposé des routes dplus au large.
Alors?  En cas de nouveau conflit mondial, le Finistère resterait-t-il un endroit exposé, pas par sa richesse, mais par ce qu'on peut faire depuis ses cotes?

 

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